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La livraison a-t-elle moins d'impact que l'achat en magasin ?

Si vous avez dû attendre deux semaines au bas mot après les fêtes, avec votre poubelle jaune près de la porte, en attendant que le local à ordures soit désensseveli des cartons qui l’avaient envahi, alors cet article devrait vous parler. 

La dernière décennie a été marquée par l’essor de la vente en ligne. Elle a concentré à elle seule la moitié de la croissance du commerce de détail. La crise sanitaire a certainement marqué un tournant dans nos habitudes quotidiennes. Selon Médiamétrie, plus de 80% des Français ont acheté en ligne en 2020. En une année, le commerce de détail en ligne a progressé de plus d’un tiers, pour totaliser 13% du marché. Désormais, il faut compter avec un milliard de colis livrés en France chaque année. Bref, beaucoup de chiffres pour rappeler simplement que questionner l’impact des livraisons semble au fond assez légitime.

Quelques infos utiles en guise d'échauffement

Avant de nous plonger dans les données du problème, faisons tout de suite le point sur quelques fondamentaux à avoir en tête lorsque l’on se retrouve à passer une commande et que l’on veut gérer son impact de façon rationnelle.

Se poser d’abord la question de ce que l’on achète : en règle générale, la majeure partie de l’impact environnemental du produit que vous achetez réside d’abord dans la fabrication. Du coup, dans le cas d’un produit à fort impact (électronique, habillement), préférez l’alternative responsable disponible uniquement par livraison plutôt qu’un produit standard disponible en magasin. Par exemple, mieux vaut se faire livrer un ordinateur reconditionné que d’acheter en magasin un ordinateur neuf. Car si l’impact de votre livraison se compterait en centaines de grammes de CO2 voire éventuellement en kilos, celui de l’ordinateur neuf se situe quant à lui entre une et deux tonnes. On remarquera au passage que les secteurs de la mode et de l’électronique comptent parmi ceux où la pénétration du e-commerce est la plus forte. 

(Attention spoiler) Si vous pouvez accéder à un produit équivalent en boutique plutôt qu’en ligne, préférez l’achat physique. C’est d’autant plus pertinent si vous habitez en ville, où la livraison serait susceptible de générer un surplus net de trafic, d’occupation de voirie, et donc de congestion et d’émissions de polluants atmosphériques. C’est également très rationnel lorsque le point de vente se trouve sur l’un de vos itinéraires habituels, ou bien est facilement accessible à pied ou en vélo.

Si vous choisissez l’achat en ligne, privilégiez la livraison en point relais plutôt qu’à domicile, ainsi que le recommande l’Ademe. Cela permet aux sociétés de livraisons de mieux optimiser les tournées (itinéraire, remplissage des véhicules) et évite des trajets inutiles lorsque le client n’est pas présent pour réceptionner le colis. Et donc si vous êtes livré(e) à domicile, assurez-vous autant que possible de pouvoir être présent(e) au moment du passage.

Groupez autant que possible les commandes plutôt que de multiplier les achats de petits volumes. Cela permettra de simplifier la logistique et donc de diminuer le trafic global lié au transport. C’est l’une des raisons pour lesquelles les CSE sont particulièrement pertinents pour organiser des commandes au profit des salariés : des commandes groupées d’un même produit, livrées en un point de retrait unique, le bureau, où les salariés doivent en temps normal se rendre quoi qu’il arrive.

Ne cédez pas aux sirènes de la livraison express. Car plus les délais de livraison se raccourcissent, plus les émissions de polluants par colis augmentent (voir graphe), et c’est particulièrement vrai quand on passe sous le seuil des 24 heures. En effet, raccourcir les délais implique d’avoir des véhicules de livraison qui ne circulent pas à plein et qui multiplient les trajets.

Évitez d’acheter en ligne des produits pour lesquels il y a un risque élevé de devoir retourner le colis. Par exemple, pour les vêtements, le taux de retour est de 30% contre 10% en moyenne. Cependant, il faut là encore mettre dans la balance le fait de se procurer une alternative responsable (vêtement de seconde main ou de fabrication 100% locale). Par exemple, un jean neuf standard pèserait 200 à 400 fois plus en émissions de CO2 que sa livraison (sans compter les ses impacts sur les écosystèmes et en termes de consommation de ressources naturelles). Une fois encore encore, il faut commencer par se questionner sur le type de produit que l’on achète.

Enfin, n’hésitez pas lorsque le choix s’offre à vous de recourir à un prestataire de livraison fonctionnant en coopérative (par exemple au sein du réseau CoopCycle). Idem lorsque sur le site du commerçant, vous avez la possibilité de choisir une option de colis réutilisables telles qu’en proposent des sociétés comme Hipli ou Opopop (à suivre prochainement notre interview avec Antonin, co-fondateur d’Opopop).

Grand flou sur l'impact environnemental des livraisons

La première chose qui frappe quand on se penche sur la question des livraisons, c’est le manque de données fiables pour évaluer leur impact. Pour l’heure, nous devons essentiellement nous contenter d’études commandées par les géants du secteur, à l’instar de celle produite par le cabinet de conseil Oliver Wyman pour Amazon. Selon celle-ci, ce serait l’achat physique, en boutique donc, qui produirait l’empreinte carbone la plus élevée. Il générerait en moyenne 1,5 fois plus d’équivalents CO2 que l’achat en ligne avec le mixe énergétique français, et jusqu’à 3 fois plus avec un mixe énergétique allemand. 

Une remarque d’emblée : quand on parle empreinte carbone, le résultat peut fortement varier en fonction de ce que l’on choisit de prendre en compte ou non. Déjà, l’étude d’Amazon exclut de son périmètre les livraisons de repas et les achats alimentaires, ce qui n’est pas une paille. Ensuite, aucune mention n’est faite de l’impact carbone lié aux conditionnements et autres emballages. Enfin, on rappellera que les impacts d’une activité sur l’environnement ne se résument pas aux seules émissions de gaz à effet de serre (pollutions aux particules fines, microplastiques, dégradation des milieux naturels, consommation des ressources naturelles, je vous passe le détail). Un rapport publié en février 2020 sous l’égide de France Stratégie, du CGEDD, et de l’Inspection générale des finances, “appelle à la prudence quant aux bilans très positifs présentés par les acteurs du commerce en ligne”. 

Le consensus est qu’en moyenne, quelle que soit la solution d’achat retenue, l’empreinte environnementale est à peu près la même jusqu’aux dernières étapes du processus : à savoir le dernier lieu d’entreposage, et ce que l’on appelle le “dernier kilomètre” qui le sépare du consommateur final. C’est vrai en moyenne, mais dans le détail, si vous passez par une plateforme qui base son modèle sur le fret aérien (Wish, Aliexpress…), rappelez-vous que les émissions de GES au kilomètre sont 100 fois supérieures à celles du fret maritime. 

Pour revenir au “dernier kilomètre”, en caricaturant, on peut donner trois grands schémas : soit des camionnettes viennent livrer des magasins près de chez vous. Soit elles font une tournée de livraisons à domicile ou dans des points relais. Soit c’est vous qui allez à l’entrepôt avec votre voiture. On appelle ça une zone d’activité commerciale mais au fond, c’est comme un entrepôt, situé sur un nœud routier, où les gens viennent d’eux-mêmes faire leurs courses. Or, rappelons que le dernier kilomètre peut représenter 30 à 40% du coût total d’une livraison en milieu urbain.

Moins de boutiques c’est fantastique ?

Argument avancé pour défendre le bon bilan environnemental du commerce en ligne : si on n’a plus besoin d’espaces de vente, ça économise du chauffage et de l’électricité, ainsi que des places de parking que l’on sait gourmandes en surface. Mais en contrepartie, l’étude d’Amazon reconnaît que le e-commerce requierrerait 2 à 3 fois plus de surfaces en entrepôts logistiques, qu’il faut aussi éclairer, chauffer et/ou réfrigérer.

Mais au-delà des comparaisons, la question centrale demeure la suivante : que le e-commerce fasse mieux ou moins bien que le commerce physique devient au final peu pertinent en soi s’il s’y additionne plutôt que de s’y substituer. On appelle cela un « effet rebond » : lorsqu’un nouvel usage, au lieu de se substituer à un ancien, vient essentiellement s’y ajouter, créant donc un surplus net d’impacts. Ce point reste à éclaircir, d’autant qu’il est difficile de déterminer quelle superficie d’entrepôts est dédiée au seul commerce en ligne. L’étude d’Amazon précise de son côté : “il n’a pas été démontré de corrélation entre progression du e-commerce et évolution de la surface commerciale”.

Plus ou moins de circulation en ville ?

Quand l’étude produite par Oliver Wyman avance que le e-commerce permettrait de diviser par 4 voire 9 le trafic généré par le commerce physique, le rapport de France Stratégie oppose une moue dubitative et formule une réponse au conditionnel : “La livraison directe au consommateur entraînerait une addition nette de mobilité en ville, car elle ne s’accompagnerait pas nécessairement de la diminution équivalente de la mobilité des particuliers pour leurs achats”. Le problème reste le même : si le e-commerce génère simplement un supplément de trafic et de consommation de ressources (encore un effet rebond), la question de son efficacité par rapport au commerce physique est moins cruciale. 

Sur le papier, il est plus efficace de faire livrer plusieurs particuliers par une camionnette plutôt que de voir chaque particulier faire un trajet en voiture. La réalité est plus complexe, car il faut tenir compte de la capacité des individus à optimiser leurs trajets : en groupant le plus possible leurs achats pour éviter de refaire des courses inutilement, en passant par plusieurs magasins en un trajet, ou en profitant d’un trajet pour le travail ou les loisirs qu’ils auraient réalisé de toutes façons. 

Du côté du commerce en ligne, plusieurs tendances vont au contraire dans le sens d’une moins bonne optimisation de la logistique et des trajets. D’abord, les consommateurs achètent de façon moins groupée. En dix ans, la fréquence d’achat a été multipliée par trois tandis que le panier moyen a diminué d’un tiers. Ensuite, la livraison en point relais décline au profit de la livraison à domicile. Cela complique la logistique et provoque des trajets inutiles lorsque le client n’est pas présent pour réceptionner son colis (dans 10 à 20% des cas). La généralisation de la gratuité pour le renvoi facilite l’achat de produits comme les vêtements pour lesquels la probabilité d’un retour est élevée (30% pour le textile contre 10% en moyenne). La livraison express détériore quant à elle le taux de remplissage des véhicules de livraison et empêche d’optimiser les tournées. Enfin, la distance moyenne entre les entrepôts et les centres urbains continue d’augmenter. 

Et les emballages dans tout ça ?

L’impact visible du e-commerce pour le consommateur, ce sont les cartons remplis de polystyrène, ainsi que les contenants alimentaires en plastiques assortis de couverts jetables. Or dans ce domaine, les données demeurent incomplètes pour faire une comparaison efficace avec le commerce physique, dont la logistique utilise également des contenants et emballages que le consommateur ne voit pas. On est cependant porté à croire que les conditionnements individuels des livraisons consomment proportionnellement plus de matériaux que les palettes des magasins. D’après le rapport de France Stratégie le e-commerce concentre en France 7% des usages de carton ondulé, soit 195 000 tonnes consommées chaque année, dont 80% seraient recyclés après utilisation. 

Le recyclage est un point important dans la gestion des déchets liés aux livraisons. Mais selon Zero Waste France, il ne constitue pas une réponse suffisante, tout comme le recours à des matériaux biosourcés pour remplacer le polystyrène et les contenants plastiques. Dans la hiérarchie de la réponse au problème des déchets, la priorité doit aller à la réduction, puis à la réutilisation, notamment via des solutions d’emballages consignés. La réduction des déchets passe donc par des efforts d’organisation et d’éco-conception de la part des plateformes, mais aussi par une réflexion des consommateurs sur le recours à la livraison.

Un coût sociétal difficile à quantifier

Pour le consommateur, la gratuité des livraisons est devenue une norme. Elle a grandement contribué à l’essor du e-commerce. Mais alors qui paye ? Pour des sociétés comme Amazon qui évoluent dans plusieurs secteurs d’activité, vendre à perte pour étouffer la concurrence est possible. C’est ce qui met aujourd’hui en difficulté les enseignes de la grande distribution. Ces dernières répercutent la baisse de leurs marges sur leurs fournisseurs (nous vous conseillons cet excellent documentaire Arte, sauf les jours de déprime, là il faut éviter) et réduisent leur masse salariale. D’après le rapport de France Stratégie, c’est dans les secteurs où le taux de pénétration du e-commerce est le plus fort que les pertes d’emploi sont les plus significatives pour le commerce physique. 

Il y a enfin les livreurs qui sont mis sous pression, l’exemple le plus emblématique étant celui des auto-entrepreneurs uberisés. Des acteurs alternatifs émergent cependant, en proposant comme réponse le modèle coopératif. CoopCycle par exemple est une plateforme de livraison qui entend proposer une alternative aux géants de la livraison de repas à domicile (Deliveroo, Uber Eats). Elle est gérée par un réseau de coopératives et d’associations, une soixantaine à travers le monde dont près de quarante en France. CoopCycle propose une application et un logiciel libre de droits, mais exclusivement réservé aux acteurs de l’économie sociale et solidaire. Pensez-y à l’occasion.

Cyclo-logistique pour réduire l’empreinte du dernier kilomètre en ville, sociétés coopératives respectant les conditions de travail des livreurs, solutions de réutilisation et de consigne pour limiter les déchets : des initiatives responsables émergent et doivent être encouragées pour réduire l’impact environnemental et social du e-commerce. Une grande partie de la responsabilité incombe aux pouvoirs publics (schémas d’aménagement du territoire pour maîtriser la prolifération des entrepôts, zones de faibles émissions en ville, réglementation du travail…) mais les consommateurs ne peuvent pas être évincés de l’équation. Cela passe notamment par une réflexion sur l’usage raisonnable du e-commerce.

Car la vente en ligne est également un atout pour les producteurs indépendants et les jeunes entreprises innovantes. En France, 200 000 entreprises (commerciales, industrielles, artisanales, agricoles…) disposent de sites marchands. Pour les acteurs de l’économie solidaire, responsable, qui innovent pour réduire l’impact de notre consommation, c’est un moyen d’accélérer la diffusion de leurs alternatives en touchant plus rapidement un public élargi. Rappelons qu’en règle générale, l’impact environnemental d’un achat se situe d’abord dans la fabrication du bien que l’on achète.. Nous prenons le parti chez Représente.org de penser que soutenir ces initiatives est un levier indispensable de la transition et que pour cette raison, le e-commerce ne peut pas être totalement écarté de nos modes de consommation. 

Les engagements Représente.org 🌱

Représente.org accompagne au quotidien les représentants du personnel qui s’engagent pour l’environnement. Nous formons les élu(e)s CSE à la compréhension des enjeux environnementaux et au décryptage de l’information pour démultiplier leur impact et déjouer le greenwashing. Intéressé(e) ? Parlons-en.

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